Présentation du sureau noir
Originaire d'Europe mais à présent répandu dans tout l'hémisphère nord ainsi qu'en Afrique, ce petit arbre caduc à croissance rapide dont la famille botanique (caprifoliacées) est remise en question - il appartiendrait en réalité à la famille des adoxacées - peut monter à 10 mètres et vivre centenaire mais la plupart de ceux que nous rencontrons se situent entre 2 et 4 mètres. Il pousse naturellement dans les sols basiques à neutres, riches en azote. Nécessitant de se trouver au soleil ou à mi-ombre pour prospérer, il est surtout répandu dans les haies, en lisière de forêt voire au bord des eaux ainsi que dans les ruines et décombres où il se ressème grâce aux oiseaux.
Il est reconnaissable à son écorce grise très structurée ; en mai et juin, éclosent de larges corymbes de minuscules fleurs blanc crème très parfumées et dressées qui laissent ensuite place à des grappes de baies lesquelles deviennent pendantes au fur et à mesures que les fruits noircissent. Ces derniers arrivent à maturité environ 6 semaines après la fin de la floraison, soit fin août pour le plus grand plaisir des oiseaux et... des hommes.
Il existe nombre d'autres variétés de sureaux ligneux aux baies bleues (surtout répandus au Canada) ou rouges ; toutes ne sont pas comestibles. Dans nos régions, il ne faut pas confondre le sureau noir avec une variété herbacée et rhizomateuse toxique qui disparaît en hiver, le sureau hièble (sambucus ebulus). D'une hauteur d'un mètre à un mètre quatre-vingt, la floraison de celui-ci est plus tardive. Il porte en outre ses baies toxiques dressées, contrairement à celles du sureau noir.
Depuis quelques années, les espèces sauvages sont délaissées dans nos jardins au profit de nouvelles obtentions plus esthétiques au feuillage pourpre et port colonnaire comme le "Black Tower" ou au port buissonnant, fleurs roses et feuillage pourpre foncé (presque noir) finement découpé comme le "Black Lace"…
Sureau noir et écologie
Le sureau joue un rôle non négligeable dans la biodiversité en fournissant abri et nourriture à un grand nombre d'animaux. Il est également l'hôte de prédilection d'un champignon nommé "Oreille de Judas" apparenté au champignon noir utilisé en cuisine asiatique.
Les oiseaux apprécient les fourches de ses branches et son feuillage dense pour abriter leurs nichées autant que ses baies pour leur nourriture lesquelles rassasient fauvettes, grives, merles, rouges-gorges et autres passereaux. Ses baies, oui, mais pas seulement…
La moelle de ses rameaux est particulièrement tendre, ce qui en fait un hôte de choix pour de nombreux insectes dont les hyménoptères, guêpes et abeilles solitaires en tête, ainsi qu'un grand nombre de chenilles de papillons et des coléoptères, cette liste n'étant pas exhaustive.
Ses ombelles parfumées attirent nombre d'insectes butineurs : abeilles, mouches et papillons entre autres.
Des insectes suceurs, tels les pucerons noirs du sureau et certaines punaises habitent ses rameaux.
Le purin de ses feuilles est insecticide, aidant le jardinier à lutter contre les pucerons mais aussi contre le mildiou ainsi que certains petits mammifères tels que taupes et rongeurs divers. Les feuilles, ajoutées au compost, accéléreraient la décomposition de ce dernier tout en favorisant la présence des lombrics.
On dit également que le sureau a le pouvoir de protéger l'orme de la graphiose !
Sureau noir, phytothérapie, médecine et recherche
Le sureau fait partie intégrante des "pharmacies vertes" dans de nombreuses cultures, depuis les Amérindiens jusqu'en Chine en passant par la pharmacopée ayurvédique.
Appelé "pharmacie de campagne", "pharmacie du pauvre", "arbre médecine", toutes les parties du sureau peuvent être utilisées par des professionnels à des fins thérapeutiques. Par des professionnels, car les vertus thérapeutiques naissent de principes actifs qui sont naturellement présents dans la plante et peuvent devenir toxiques à haute dose ou si la plante est mal utilisée.
Feuilles, tiges et racines sont utilisées pour combattre les spasmes musculaires et, surtout dans les temps anciens ainsi qu'en médecine chinoise, réduire les fractures.
Les feuilles sont utilisées contre les maux de dents et en cataplasme pour soulager les contusions et entorses.
La seconde écorce, verte est utilisée en décoction pour ses vertus diurétiques et laxatives. Elle aide entre autres également à lutter contre les coliques, la goutte, les rhumatismes.
Les fleurs sont utilisées fraîches ou séchées - elles se conservent ainsi plusieurs mois. Riches en principes actifs, elles présentent des propriétés anti inflammatoires, antihistaminiques (contre les allergies), antirhumatismales, antivirales, diaphorétiques (ce qui signifie qu'elles favorisent la sudation), diurétiques, expectorantes, immuno-stimulantes et légèrement laxatives. Utilisées en infusion, elles aident à combattre la grippe, les maux de gorge, l'otite, le rhume, le rhume des foins ainsi que l'arthrite. Elles seraient même anti diabétiques En décoction, elles ont des propriétés adoucissantes et calmantes pour la peau.
Légèrement toxiques, une toxicité qui disparaît avec la cuisson, les baies sont vomitives. Riches en vitamines A, B6, C et en fer, ces dernières tirent surtout leurs propriétés des puissants antioxydants qu'elles renferment ; les polyphénols. Ces antioxydants renforcent l'immunité et jouent un rôle important dans la prévention de certaines maladies. Pour la pharmacopée, tant préventive que curative, on en fait un sirop épais et concentré appelé : Rob de sureau.
Les effets combinés du sureau, diurétiques et dissolvants aident à prévenir les pierres au rein. Purifiant du sang et tonique vasculaire, le sureau noir fortifie le système circulatoire, prévient les maladies cardiovasculaires et est indiqué en cas d'hématome, d'ulcère et eczéma avec infection.
Des études sont en cours au Canada quant aux propriétés des fleurs et baies des variétés canadiennes de cette plante pour combattre le cancer...
Sureau noir et cosmétologie
En raison de leurs propriétés astringentes, émollientes et calmantes, les fleurs sont utilisées dans des lotions pour les yeux, la peau, le rasage.
Sureau noir et arts
Le sureau produit des teintures noire, verte et violette.
Le jus de baies, fixé avec du thé et additionné de poudre d'alun et de gomme arabique donne de l'encre.
Son bois doux au coeur tendre sert à la fabrication de flûtes, sifflets et autres mirlitons depuis l'Antiquité. On en fabrique également des manches d'outils qui ne provoquent pas d'échauffement...
Sureau noir et folklore
Appelé arbre aux fées, en raison d'une légende qui voudrait que chaque fleur soit une fée venue se réfugier entre ses pétales, le sureau noir joue un rôle important dans divers folklores, principalement en Europe.
Perçu comme protecteur en raison de ses nombreuses propriétés, il était largement planté près des maisons et faisait l'objet d'offrandes rituelles. Cloué sur les portes des habitations, il protégeait du mauvais sort mais… Malheur à quiconque en abattait un et le brûler pouvait faire tarir le lait des mères de toutes espèces !
Le sureau noir est traditionnellement lié aux esprits de la nature et aux dieux : la déesse germanique Holda plus connue sous le nom de Frau Holle dans le conte des frères Grimm, une déesse hivernale aux attributions multiples, protectrice et bienveillante envers les courageux ou encore le dieu nordique du tonnerre Thunar.
Dans la culture celtique, il était associé à la mort, portail vers l'au-delà, car les druides sculptaient des flûtes en bois de sureau afin de pouvoir converser avec les défunts.
Pour les Chrétiens, il est l'arbre de Judas depuis que ce dernier s'y serait pendu. A ne pas confondre avec l'arbre de Judée, cercis siliquastrum.
Plus agréable, une croyance de nos campagnes voudrait qu'il inspire à ceux qui s'endormiraient dessous, des rêves érotiques.
Porte-bonheur, arbre de prospérité, il aurait le pouvoir d'éloigner la foudre, de mettre fin à la stérilité.
Sureau noir et gastronomie
Et en gastronomie me direz-vous ?
Eh bien, conservés dans du vinaigre, les boutons agrémentent les salades.On prépare du vin, des jus, sirops, gelées et confitures à partir des baies lesquelles entrent également dans la composition de pâtisseries à base de pommes. Elles servent également de colorant naturel.
Outre ces baies on utilise les fleurs au fort parfum de muscat pour réaliser diverses boissons alcoolisées telles que la " Fleur de Franchimont" qui est un vin de pommes additionné de fleurs d'une région de notre terroir wallon où les vergers foisonnent : moelleux, il est excellent frais, en apéritif ou encore en accompagnement de desserts.
La "Franche Fleur", bière de Franchimont est une bière blonde de haute fermentation brassée par la Brasserie du Grain d'Orge (née en 2002) au nord de la province de Liège.
Au salon Horecatel, un salon réservé aux professionnels du secteur HORECA (comme son nom l'indique) qui se tient chaque année en mars au Wex de Marche-en-Famenne, j'ai découvert cette année une boisson apéritive citronnée qui fait également la part belle aux fleurs de sureau puisque les précieuses corolles se retrouvent dans la bouteille telles les paillettes d'une boule à neige. Son nom : "RoomeR". A déguster également en cocktail ou en accompagnement de desserts à l'instar de la Fleur de Franchimont.
Davantage "grand public" et plus du tout artisanal, une marque bien connue a introduit le parfum de fleurs de sureau dans sa citronnade.
On introduit les fleurs de sureau dans les limonades maison, les sirops, les gelées ; on en fait des beignets et… du sorbet !
Gourmandisement vôtre !
Christine.
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